Un article proposé par jbfh.
Lorsque j’initie quelqu’un au jeu de rôle, je commence généralement par dire que c’est un jeu dans lequel on ne peut pas gagner, ni perdre et que la MJ n’est pas là pour jouer contre les autres joueuses.
Et puis j’ai lu Dethroners.
Dethroners est un jeu de Jebediah Berry et de Andrew McAlpine, illustré par Khaled Khlifi, publié par Phantom Mill Games et kickstarté lors du Zinequest 2021. Et ma foi, il contredit quelque peu mon affirmation de base.
C’est un jeu où l’on raconte comment des Renégats (les joueuses) ont vaincu et renversé une Divinité (la MJ). Enfin ça… C’est s’ils y parviennent, dans le cas contraire, la Divinité reste sur son trône. Hé oui, c’est donc un jeu de rôle où on peut gagner ou perdre ET où la MJ joue contre les joueuses. C’est tout un monde qui s’effondre !
Le jeu repose sur une idée plutôt cool : à mesure que les Renégats obtiennent des victoires contre la Divinité, les joueuses dépossèdent la MJ de ses outils de narration. Le camp qui a le plus d’outils lors de la dernière phase du jeu à plus de chance d’obtenir la victoire finale. Ces outils se présentent sous la forme de tout petits playbooks que l’on appelle des Titres – comme dans titres de noblesse. Ils sont à peu près tous construits de la même façon : un Titre (Gardien des traditions, Eclaireur, Arpenteur de Pavés, etc.), un domaine (le lore, le voyage, les villes, etc.), une capacité spéciale généralement active lorsque les Renégats sont dans le domaine correspondant (par exemple l’Arpenteur de Pavés l’emporte en cas d’exæquo lors d’un Challenge urbain) et ce que vous devez faire lorsque c’est au tour du Titre de jouer (ici l’Arpenteur de Pavés devra tirer sur quelques tables ce qui se passera lors d’un séjour des Renégats dans une ville).
Au début, la MJ a la majorité des outils pour créer le monde, les péripéties, etc. car elle possède presque tous les Titres. Les Titres permettent d’agir sur un domaine particulier : décors urbains, forestiers, montagneux ou sur des phases de jeu comme les repos, la création de lore, l’ajout de lieux sur la carte ou encore la bataille finale.
Les joueuses, elles, incarnent les Renégats chacun débutant avec un Titre tiré au hasard. C’est d’ailleurs l’acquisition de ce Titre qui a attiré l’attention de la Divinité. Les Renégats disposent en parallèle d’une fiche de personnage intégrant 3 caractéristiques et un pouvoir utilisés pour résoudre les Challenges dont certains permettent de récupérer de nouveaux Titres.
In fine, plus un camp aura de Titres, plus il aura de moyens pour introduire de nouveaux éléments dans la fiction et pour forger l’univers. Un peu à la manière d’un Ten Candles inversé dans lequel la MJ gagne des possibilités narratives à mesure que la partie avance, jusqu’à déposséder les joueuses de leur personnage à la fin en les tuant (je vous assure que Ten Candles est bien mieux que ce que laisse sous-entendre ce résumé. Jetez-vous dessus !)
Dethroners est donc un jeu à narration partagée qui comporte une grosse part de world building avec création de carte qui évolue tout au long de la partie, un peu de stratégie pour réussir à voler les Titres à la Divinité et une mécanique globale séquentielle. Ce que j’entends par là, c’est que chaque Titre est appelé à jouer soit à tour de rôle, soit lorsque l’occasion se présente (avoir les Renégats dans une ville permettra à l’Arpenteur de Pavés de jouer). C’est relativement simple mais le petit organigramme à la fin du jeu ainsi que l’exemple de partie sont tout de même les bienvenus !
Dethroners est disponible en anglais ici : https://phantommillgames.com/
PS : Les exemples cités dans cet article ont été adaptés en français